Les nouveaux véhicules Renault tout électriques (image : Renault)
Secteur difficile que celui de l’automobile : crise du pétrole donnant des signes d’alarmes récurrents, crise du pouvoir d’achat, problèmes climatiques mondiaux pointant du doigt la pollution des voitures…
Le secteur automobile subit de nombreuses contraintes qui sont en train de façonner de nouvelles pistes de développement.
A l’occasion du salon mondial du Web qui a lieu tous les ans à Paris (Le Web), Renault a décidé de s’associer à l’évènement pour présenter sa nouvelle voiture urbaine électrique : la Twizy.
Il s’agit d’une nouvelle stratégie de communication de la part de Renault, qui sort des chemins traditionnels classiquement pratiqués par la profession.
Quel rapport entre le monde de l’automobile et un salon dédié aux passionnés de technologies et startup du Web ?
Tout simplement l’esprit d’innovation et changement.
Ainsi, Carlos Ghosn, PDG de Renault Nissan, est venu faire un discours devant un parterre d’entrepreneurs et passionnés du Web.
Loin des poncifs éculés sur l’innovation, ce discours fut l’occasion d’une analyse intéressante et sans concession de la part de M Ghosn.
L’automobile en perte de vitesse
Constat qui peut faire peur : Carlos Ghosn nous précise que la voiture arrive au 17ème rang des centres d’intérêt des jeunes japonais, bien après les objets Hi-Tech que sont les ordinateurs, internet, les téléphones.
Ce changement est notamment perceptible au sein des nouvelles générations, notamment celle dénommée Y, pour qui posséder une automobile ne présente pas d’intérêt, seule comptant son utilisation (par exemple en location / partage).
Sous forme franche d’un constat d’échec, Carlos Ghosn a ainsi avoué l’incapacité des acteurs de ce secteur à maintenir l’automobile comme un objet de désir / Plaisir et son combat pour remettre l’automobile au même niveau que les objets Hi-Tech communicants.
Passer du Kaizen à l’innovation de rupture
L’industrie automobile a engendré des techniques de productivité qui sont désormais diffusées dans tous les autres secteurs de l’industrie. Parmi elles, le Lean Manufacturing, technique issue de Toyota.
Parmi les outils du lean, le Kaizen fait la promotion de l’amélioration continue, engendrant une innovation incrémentale par touches certes petites mais continues.
Bien que très utile, M Ghosn a rappelé le besoin de se réinventer et la nécessité d’aller vers une innovation de rupture.
Ayant passé quelques années dans le secteur automobile (cf mon profil Viadéo/Linkedin), c’est un constat auquel j’étais arrivé. A force d’optimiser par petites touches incrémentales, essayant d’optimiser à tous niveaux, que ce soit les temps de production (ms) ou les dépenses (centimes d’euros), on fini par « assécher » les pistes d’améliorations.
Ces techniques sont bien rodées et bien diffusées. On peut donc penser que tous les compétiteurs d’un secteur en arrivent à des résultats quasi-similaires en termes de coûts, qualité, délai.
Quelle voie de salut alors ? Elle ne peut passer que par une innovation plus radicale, que ce soit en tant que produit /service ou business model.
C’est le pari que fait Renault avec les technologies électriques. Ceci est d’autant plus courageux que les investissements nécessaires et le poids réglementaire sont très importants comme le rappelle M Ghosn.
L’Alliance Renault-Nissan a ainsi investi 4 milliards d’euros dans le programme zéro émission et une équipe de 2000 personnes (1000 chez Renaultet 1000 chez Nissan) travaille au quotidien sur le véhicule électrique.
Une communication moderne
M Ghosn a abordé le point de l’adaptation de l’automobile aux nouvelles formes de communication. On ne peut désormais plus éviter le marketing de réseau et les réseaux sociaux.
La tendance est forte et touche tous les autres secteurs d’activités, donc l’automobile doit s’y mettre.
15% des dépenses de communication de Renault sont désormais affectées au Web et devraient grossir d’ici les prochaines années. On peut penser que cette pratique va être suivie par les autres compétiteurs.
La stratégie tout électrique de Renault
Renault a mis en place une stratégie de partenariat pour partager les expériences, risques et succès.
Elle travaille avec la société Better Place qui est chargée de gérer la partie service de l’offre : la recharge de la batterie. Etant donnée l’état de la technologie d’aujourd’hui, il n’était pas possible de recharger une batterie en 5 minutes, comme dans le cas d’une station essence classique.
Better Place a alors imaginé un service d’échange de batterie automatique pouvant s’effectuer en 3 minutes sur des emplacements dédiés (système Quick Drop).
Ces services sont en test en Israël et Danemark. On le sait, les capacités des batteries modernes sont assez sensibles aux conditions de température. Ces tests devraient donc permettre un bon retour d’expérience tant sur les climats chauds que froids.
Une nouvelle gamme de véhicules électriques
Pour accompagner sa stratégie d’offre tout éléctrique, Renault a crée une nouvelle famille de véhicules.
La nouveauté Twizy :
Conçue pour une cible urbaine et pouvant emporter au maximum 2 passagers, la twizy se veut la voiture d’appoint de la famille, permettant d’effectuer de petits déplacements urbains facilement et à moindre coûts.
Sur un concept original, la twizy mise sur l’agilité et praticité d’un scooter et le niveau de protection bien supérieur proposé par une voiture.
Le dynamisme est mis en avant par le moteur électrique délivrant au démarrage un couple de 57 Nm, soit environ 4 fois plus que le couple disponible par un scooter à trois roues de 125 cm3. Cette performance permet à Renault Twizy d’offrir des démarrages et des reprises énergiques afin de s’extraire rapidement du trafic.
Après la commercialisation du Kangoo Express ZE et de la Twizy, d’autres modèles viendront enrichir la gamme de véhicules électriques :
- Zoe : de la taille d’une Clio, elle permettra à la fois un usage urbain ainsi que des longs voyages, profitant de son système de changement de batterie QuickDrop.
- Fluence Z.E: familiale tout électrique, la fluence ZE pourra emporter une famille sur des trajets extra urbains.
Un vent de changement
La stratégie de Renault est donc à saluer, car la 1ère du genre à miser sur le tout électrique à l’heure ou de mauvaises langues insistent sur les capacités limitées de la technologie actuelle.
La plupart des concurrents de Renault semblent ainsi préférer attendre que la technologie s’améliore encore et miser sur l’hybridation (mix électrique + thermique).
En conjuguant technologie et nouveau business model, Renault dame le pion à ses concurents et ose aller là où personne n’a encore osé s’aventurer.
Le but étant de réinventer l’automobile, une automobile désormais plus en accord avec son temps…
Ci-dessous la video de l’intervention de Carlos Ghosn lors du salon LeWeb10 :
Lien utile: Site Renault Z.E
Bonjour,
C’est une annonce qui poursuit la communication de cet homme extraordinaire qu’est Carlos GHOSN digne successeur de Monsieur Louis SCHWEITZER.
Mais que pourra t il faire contre ses subalternes fermés à l’innovation de rupture qui travaillent avec des outils dépassés de 20 ou 30 ans? Que peut il faire contre des barons de leur domaine arguant d’une connaissance nécessaire et suffisante pour balayer d’un revers de main toute innovation?
Un exemple: la simulation fonctionnelle.
Un expert Renault m’a dit: « Nos chefs font les mauvais choix et ont besoin de rentrer dans le mur plusieurs fois avant de s’apercevoir de leur erreur. » et d’ajouter « Votre solution est bonne, mais je ne peux rien faire ».
La Simualtion chez Renault n’a même pas pris les solutions qui ont fait leurs preuves chez Nissan (!!!!!). Non! Des millions sont investis dans des langages avec des partenaires utilisant ce même langage non adapté à l’électronique. Alors, comme avec un langage prévu pour les matrices (qui est propriétaire), on continue d’aller dans le mur.
Tout capitaine d’une équipe de football peut être le plus doué de sa génération, il ne peut pas gagner un match tout seul.
Les constructeurs allemands développent ces méthodes et langages depuis deux ans, à grands renforts de sous-traitants. Pour les constructeurs français, on continue à perdre deux ou trois ans à faire des prototypes et des essais pour chercher et tâtonner.
Quel gâchis. Rappelons nous qu’au début du 20ème siècle, les américains copiaient sur Renault qu’ils considéraient comme l’inventeur de l’automobile…
Je peux comprendre votre énervement mais ne partage cependant pas votre point de vue. Un des pires risques pour une démarche d’innovation est que le projet ne soit pas soutenu par le Top Management, ce qui n’est pas le cas de Renault.
On ne peut en effet pas douter de la conviction de M Ghosn, agissant en vrai leader et donnant la vision stratégique innovante de Renault.
Le fait qu’il soit convaincu et motivé surpasse tous les « freins » internes des « barons » comme vous le dites.
D’un point de vue managérial, les meilleures pratiques consistent en effet à « aligner » toute la chaîne du management sur ses objectifs. Ceci veut dire que les subordonnées ont des objectifs personnels en ligne avec les objectifs du leader. Ceci veut également dire que leur évaluation de fin d’année dépend de cet alignement. Ainsi, soit vous jouez le jeu, soit vous êtes sanctionnés. Dans le cas de M Ghosn, son management franc est connu, d’où ma confiance en Renault à exécuter le plan stratégique, sans problèmes de « barons ».
Vous avez raison pour une équipe de foot 😉 Le monde de l’entreprise permet cependant au contraire de choisir ses joueurs et les changer très rapidement, avec une foule de talents qui ne demande qu’à participer à des projets ambitieux.
Pour le reste, c’est l’avenir qui nous dira 😉
Je vous rejoint sur ce point. La culture du risque (calculé) n’est en effet pas souvent prônée en France, au contraire de nos collègues américains. La encore, c’est au Top Management de donner le ton et rassurer ses collaborateurs pour leur permettre de donner le meilleur d’eux-même. Faute de quoi, on tombe dans les travers que vous décrivez très bien.
Bonjour, je trouve cet article intéressant sur le constat, constat qui a été fait aussi en Allemagne, notamment chez BMW. Les réponses que vous apportez sont typiquement francaises, avec une vision hiérarchique qui me semble assez dépassée. Il faut envisager les choses de manière plus horizontale. Comme en Allemagne.